Conte Patricia Verneret

Le cœur en porcelaine

Cela fait longtemps que je n’avais pas écrit de conte. Je dédie celui-ci à celles et ceux qui, comme moi, tombent régulièrement dans les pièges de l’illusion et oublient trop souvent les pouvoirs du cœur.

Ce matin j’ai vu mon cœur.

Il était en porcelaine. Je ne savais pas qu’il pouvait casser en un geste maladroit.

Geste, parole ou pensée ! Il s’est brisé.

Je le pensais solide de par les protections que je lui avais construites.

Il palpitait, s’emballait… un peu trop ! Ma naïveté l’ouvrait à tous les coups du sort qu’il recevait : déceptions, trahisons, désillusions.

Au début, j’étais tellement surprise devant toutes ces attaques répétées : il doit y a voir une erreur. C’est une maladresse. J’ai dû faire erreur…

Et puis toutes ces joies qui le remplissaient de plaisir ! Elles grignotaient ma méfiance grandissante… et paf ! Un nouveau coup porté au cœur qui s’était à peine ré-ouvert pour encore plus se refermer.

Je l’ai enfermé dans une boite que j’ai fabriquée avec tout ce que je trouvais : répliques acerbes, humour dévastateur, fuites impuissantes, réactions défensives, ironie et mépris. Je pensais ma construction solide et moi seule avait la clé. Je ne faisais pas faire de doubles !

Parfois les relations le cabossaient un peu par ci par là. Des petits trous faisaient leur apparition. Je le rafistolais de ci de là. Et le recouvrais d’une couche encore plus épaisse avec ce que je trouvais à ma portée : mes croyances, mes certitudes, mes résistances intérieures, le mental qui refuse de passer à autre chose.

Le pire de tout : je l’avais enseveli jusqu’à le perdre de vue. J’oubliais son existence et c’était tant mieux ! Ma sensibilité naturelle s’effaçait jusqu’à l’insensibilité reposante.

Des fois c’était compliqué. Car il suffisait d’une musique, d’une bonne nouvelle, d’un poème, d’un regard chaleureux, d’un geste réconfortant ou d’une main caressante pour que les murs de sa forteresse s’effritent. Mais je résistais et repartais de plus belle pour lui parfaire une prison de toute beauté.

Mais l’endurcir est fatiguant car c’est un travail de tous les instants.

La chaleur que mon cœur dégageait ne pouvait s’éteindre. Alors, elle a cuit la matière et l’a transformé en porcelaine. Enfin, j’imagine ! Car je ne savais pas qu’il était en porcelaine avant qu’il ne se brise !

Le pire dans l’histoire, c’est que j’ai participé à sa fin.

D’abord, en restant enfermé.e… on étouffe ! Alors pour pouvoir respirer, j’ai eu besoin de pardonner, de m’apaiser, de lâcher prise. Je pense que cela a fragilisé l’édifice !

Et puis, il s’est rebellé.  En pensant le protéger, je l’ai empêché de s’exprimer. Il en a eu assez. Lui, depuis l’intérieur, s’est allié aux chagrins causés par l’extérieur.  Il a explosé !  

D’abord, j’ai eu mal. A mon égo. Mais cela s’est passé tellement vite que je n’ai pas eu le temps de ressasser !

Quelle ne fût pas ma surprise de sentir qu’au lieu de disparaitre, il était toujours là. Sa carapace tombée avait laissé apparaitre une sorte d’énorme soleil. Il rayonnait de l’intérieur.

Les aléas de ma vie lui ont donné une forme singulière et un éclat particulier. J’ai alors compris qu’il n’avait pas besoin d’être protégé.

Il avait besoin de ma délicatesse et de ma douceur pour alimenter ses batteries. Que je lui promette et donne l’espace pour se déployer et rayonner. Ce qui ne dépend pas des autres ou des situations mais bel et bien de moi et de mon rapport au monde et à « moi-m’aime ».

Il est tout à fait capable de s’adapter à toutes les situations ! Car voyez-vous, il contient tellement d’amour. Ou je devrais plutôt dire d’Amour avec un grand A. Celui-là ne s’épuise jamais. Car il se nourrit de la Vie et des liens que l’on créé. En premier lieu, la relation que l’on entretient avec Soi.

Et cet amour-là occupe tellement de place qu’il ne laisse rien entrer d’autre que de l’amour. Tout ce qui n’est pas Amour brûle et se dissout à son contact.

Là où je pensais que je deviendrais fragile, ce fût le contraire ! La peur de me voir brisée a cédé la place à la force de vie qui éclaire tout sur son passage. Même les chagrins et les trahisons ont fini par passer leur chemin. 

L’amour du dedans s’est déployé vers tout ce qui m’entourait. Il a rencontré et fusionné avec l’amour du dehors. La vie a pris des couleurs insoupçonnées.

Il palpite toujours mais non plus de peurs. Plutôt de curiosité excitante à l’idée de l’inconnu.

Il ne s’emballe plus. Il existe calmement, pleinement attentif à mes besoins profonds.

Je ne me sens plus trahie, déçue ou désillusionnée : l’amour intérieur a transformé le tout en compréhension, lâcher prise et clarté d’esprit. Et la joie a voulu le rejoindre !

Mon cœur n’était pas en porcelaine. Mes peurs avaient masqué sa réalité. Elles parasitaient ses messages…

Mon cœur est un soleil.

« Heureux soient les fêlés car ils laisseront passer la lumière »

Michel Audiard

Patricia Verneret
Coach de vie, formatrice, auteure


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