Il fût un temps
Il fut un temps où je ruminais et le temps se figeait.
Aujourd’hui je m’accorde un temps pour le faire. On mâche bien la nourriture pour la rendre plus digeste avant de l’avaler ! Puis, je passe à autre chose.
Il fut un temps où je figeais par ma volonté.
Je la pensais indispensable pour atteindre mon but et elle devenait souvent très-trop forte jusqu’à faire pression. Aujourd’hui, je m’ouvre à d’autres façons de faire… et je prends conscience que je vais exactement là où je souhaitais me rendre, mais par un chemin que je n’avais pas envisagé.
Il fût un temps où je me cherchais dans le regard de l’autre
Si l’autre me trouvait belle ou intelligente, cela me rassurait !
Aujourd’hui, le regard de l’autre est « la cerise sur le gâteau » et en prenant soin de moi, je me suis et me sens appréciée.
Il fût un temps où je ne comprenais pas les personnes qui se plaignaient de leurs vies sans rien tenter pour changer
quoique ce soit, alors que tout était là pour qu’elles puissent passer ce cap. Aujourd’hui, je ne cherche plus à « raisonner leur point de vue ». Je comprends que j’ai la possibilité de ne pas alimenter leurs comportements en cessant de réagir en sauveur ou en accusateur, en les écoutant s’exprimer tout simplement… jusqu’à un certain point pour éviter d’alimenter inconsciemment leurs problèmes !
Je continue de mener ma vie à ma façon. Je ne gaspille plus mon énergie à tenter de les con-vaincre, car elles seules ont le pouvoir de changer et elles le feront quand elles seront prêtes.
Il fût un temps où la lecture d’expériences des autres m’inspiraient et j’avais envie d’être comme eux.
Ils semblaient tellement sereins ! Et puis j’ai compris qu’ils offraient leurs témoignages : c’est possible ! Ils portaient un message plein d’espoir : d’autres s’étant trouvé dans les mêmes sentiments ont réussi à les dépasser-transformer ! Cependant, mon chemin ne sera pas forcément le leur. Ils sont comme un phare, pas l’unique chemin. Je ne fais plus l’amalgame entre la vie d’un autre et comment je vivrai la mienne.
Je cherche à être « juste » avec moi-même.
Il fut un temps où les autres passaient avant moi
leurs douleurs, leur souffrance, leurs problèmes et leur bien-être. Aujourd’hui, je ne les oublie pas mais j’ai cessé de nier la personne que je suis. Ce n’est pas facile, parfois, sans le vouloir, on tombe dans le psychodrame de l’autre, dans son monde ; on est happé par une scène dramatique comme au cinéma. Puis, la lumière se rallume et on retrouve sa place de spectateur. On l’avait juste oublié.
Je pense à moi et à eux, un temps pour tous, mais comme le temps ne s’étire pas, je suis vigilante à ne plus m’oublier.
Il fut un temps où j’aimais inconsciemment à me considérer comme une victime.
Peut-être que je cherchais dans la compassion de l’autre la certitude que je méritais cette attention ?
Évidemment, ma douleur les faisait fuir, c’était trop lourd à porter. Ils avaient déjà leurs propres vies à soutenir sans devoir prendre en charge la mienne aussi !
Aujourd’hui, j’assume totalement mes choix, les meilleurs comme les plus douloureux, et, curieusement, les autres s’intéressent à moi.
Il fut un temps où je cherchais à prouver mes capacités.
Alors, c’était le passage en force et en face de moi, je rencontrais des attaques, des doutes, des critiques et des jugements : on me jaugeait ! J’en ai eu assez et j’ai choisi de m’aimer… je n’ai plus éprouvé le besoin de prouver.
J’ai juste envie de vivre et la curiosité de m’expérimenter autrement, de m’exprimer telle que je suis.
Il fût un temps où j’attendais la douleur pour me lancer dans un accouchement d’un autre moi.
Tout passage cheminait par la bataille, les résistances, les cris, comme si, plus c‘était fort, plus cela me donnait l’impression d’être vivante. On dirait bien que cela a changé, mais je ne sais pas encore où cela mènera. Mais comme il fût un temps où je manquais de confiance en moi et en mon à-venir, il semblerait aujourd’hui que cette confiance soit devenue solide et que je peux compter sur elle pour m’aider à traverser la passerelle qui mène d’un Moi à un autre… Peut-être puis-je profiter du voyage en toute simplicité ?
La nouveauté, c’est que j’ai tellement pratiqué l’écoute de mon intérieur, que je sens venir le changement avant même qu’il ne soit effectif, ce qui me laisse le temps de l’accueillir et de l’apprivoiser. Cela n’évite pas le chemin mais il est plus facile à parcourir.
« Il fut un temps » a duré le temps qui lui était imparti et qui m’était nécessaire.
Le temps qu’a duré ma pensée que je trouverai à l’extérieur la solution à mes problèmes et mes doutes, une source de soulagement ou d’apaisement. Ce temps a cessé quand j’ai compris que tout débutait en moi.
En cessant de chercher la solution à l’extérieur, elle a surgi en moi. L’extérieur est important mais sous une autre forme : j’y trouve de l’appui et de la compassion qui soutiennent mon énergie (si elle s’avère défaillante) pour passer d’un état à un autre et aussi de l’aide parfois non demandée mais bienvenue.
Il n’y a pas une seule façon de comprendre mais des outils et des moyens plus douloureux à vivre que d’autres. La bonne nouvelle, c’est que l’on va toujours à la rencontre de soi. Et lorsqu’on s’est enfin vu, entendu, compris, cela ne mène pas au nombrilisme ou à l’égoïsme contrairement à mes croyances d’antan : on peut toujours partager tout cela avec les autres !
Je ne crois pas que tout ceci soit une affaire d’âge, c’est une affaire d’expériences, ça oui ! Mais si cela prend du temps, c’est peut-être que l’on s’est entêté et qu’on a eu des difficultés à lâcher avec nos peurs, nos résistances ?
C’est aussi une question de maturité intérieure et de remises en questions. Pas dans le sens d’être meilleur, juste en ouvrant ses possibles, en étant ouvert à autre chose que son existant, on grandit inévitablement.
Cependant, la maturité n’est pas dépendante de l’âge. : on peut-être un jeune sage et un vieil imbécile…
Peut-être que si chacun fait ce retour à la source (Soi), nos ratés-colères-frustrations n’auront pas le temps de se transmettre aux générations suivantes. Et peut-être bien que leur temps s’en trouvera plus serein…