Déployer ses ailes

Il parait que les contes s’adressent directement au subconscient. Je ne sais pas si c’est exact, mais il est sûr que vous ne pouvez pas lire ce conte avec votre tête d’adulte.

Non… Laissez votre cœur d’ex-enfant reprendre la main, le temps de voir ce qu’il parviendra à faire avec celui-là… Plantons le décor : une pièce chaleureuse, une vieille dame assise dans un fauteuil et vous, enfant, assis par terre, le visage attentif  tendu vers celle qui raconte…


Ne me demandez pas qui m’a rapporté cette histoire, car je ne sais plus si je l’ai entendue, rêvée ou vécue.

C’est un bout de vie de 2 jeunes enfants dont je préfère taire les noms, par souci de préserver l’anonymat pour leur garder une vie tranquille.

Je peux donner une tranche d’âge : entre huit et dix ans. Et presque autant d’années d’amitié. Ces deux là étaient aussi inséparables que les doigts d’une main. Ils partageaient tout ! Les jeux, les ours en peluche, les consoles, les lectures, leurs joies et leurs peines.

Un beau jour, la petite fille manqua leur rendez-vous quotidien.

Ils n’allaient pas dans la même école, mais se donnaient rendez-vous chaque jour aux mêmes heures, histoire de se raccompagner. Ils se racontaient leurs jeunes vies, s’interrogeant régulièrement sur les comportements des adultes. Ils leur paraissaient tellement absurdes et compliqués ! Ils n’étaient d’ailleurs pas bien pressés de grandir ces deux là, car, croyaient-ils, ils perdraient leur joie de vivre.

Excusez-moi, je m’égare… Le petit garçon était inquiet car la petite fille n’était pas au rendez-vous. Ce n’était pas dans ses habitudes, aussi il la chercha partout sans la trouver… jusqu’au moment où il eut l’intuition qu’elle s’était cachée pour vivre un chagrin.

Aussitôt, il se dirigea vers leur endroit à eux seuls, un lieu où les secrets les plus profonds et difficiles pouvaient se raconter.

Elle était là, les yeux perdus dans le vide… Tellement concentrée qu’elle ne l’avait même pas entendu arriver ! Il s’approcha doucement pour ne pas l’effrayer et lui laisser l’espace avant de se dire. Il sentit les larmes couler sur ses joues car le chagrin de son amie le touchait en plein cœur.

Elle ne tarda pas à lui expliquer : son oncle qu’elle adorait n’allait pas bien, mais les adultes refusaient de lui expliquer quoique ce soit, prétextant que ce n’était pas des soucis à donner aux enfants. Du coup, elle imaginait tout… version film d’horreur ! Il a perdu son travail ? Il est malade ? Il va mourir ? Il fait une dépression ? Il a fait quelque chose de terrible ? Il va partir pour toujours ? Il souffre ? Qu’est-ce que je peux faire ??? J’aimerais tellement pouvoir le soulager !

Les deux enfants, comme à leur habitude lorsque quelque chose les turlupinait, réfléchissaient à voix hautes. Et ils en pleuraient tellement ils se sentaient impuissants devant quelque chose qu’on ne leur avait même pas expliqué !

Leur chagrin fût si fort et leurs appels si sincères et généreux, qu’ils eurent la surprise de voir apparaitre un être majestueux devant eux, comme par magie !

Après les premiers émois de surprise, ils eurent l’impression de le/la connaitre depuis toujours, pourtant ils étaient sûrs de ne l’avoir jamais rencontré(e) ! Le-la,  car son visage changeait d’apparence : il-elle leur expliqua que c’était leur raison qui éprouvait des difficultés à croire en sa présence. Leur cœur, lui, savait bien… S’ils se concentraient tous les deux assez fort sur un choix définitif, son apparence se stabiliserait.

Aussitôt dit, aussitôt fait ! Tout en ne sachant absolument pas comment ils s’y étaient pris, cet être devint une femme rayonnante de bonté et de douceur.

« Je vous ai entendu et votre générosité m’a conduite jusqu’à vous. Je suis là pour répondre à votre question : qu’est-ce que vous pouvez faire ? »

La dame les invita à la suivre jusqu’à une rue passante où, curieusement, personne ne sembla les remarquer. Ils étaient déçus car ils ne voyaient rien de spécial… Jusqu’au moment où la gentille dame passa sa main devant leurs yeux. Ils n’arrivaient pas à y croire ! Ce qu’ils voyaient maintenant, c’est que certaines personnes avaient comme des ailes immenses d’au moins 10 mètres de haut, pendant que d’autres semblaient ne pas en avoir, alors que d’autres encore avaient comme des moitiés d’ailes ???

Les questions se bousculaient et la dame souriante repassa ses mains devant leurs yeux.

Avec ébahissement, ils virent des petits enfants comme attachés aux adultes aux demi-ailes ou sans ailes, tandis que les personnes avec les grandes ailes semblaient marcher librement et légèrement. Ces enfants semblaient en souffrance et tentaient de se faire entendre.

« Les enfants que vous voyez sont les enfants qu’ont été ces personnes. Cet homme à droite a souffert de n’être pas vu pendant son enfance, ses parents n’avaient jamais de temps à lui accorder. Cette femme dans son enfance n’a jamais pu être elle-même, élevée dans des règles qui l’ont empêchée d’être entendue. » Et elle continua de raconter les histoires d’enfance des uns et des autres, qui semblaient n’avoir jamais été réglées, dépassées, apaisées.

« C’est ce qui arrive à mon oncle ? » Questionna la petite fille.

« Oui. Qu’importe les apparences matérielles, tout a débuté à cet instant : Il est en colère depuis tout petit alors qu’il assistait impuissant en silence à la violence de son père.

D’autres évènements sont venus renforcer cette colère, alors qu’ils étaient aussi des occasions de guérison. Il ne s’est pas apaisé avec le temps, même s’il semble ne pas se souvenir de sa colère… Aujourd’hui elle l’étouffe et l’empêche de vivre sa vie.

-Comment peut-on l’aider ? » S’écrièrent les deux enfants d’une seule voix !

Émue par leur générosité, elle passa une troisième fois sa main devant leurs yeux. Alors apparurent des Anges avec des ailes immenses. Avec stupéfaction, ils les virent entourer de leurs ailes leurs protégés et les enfants attachés. Pour la plupart pourtant, rien ne semblait se passer !

Quand leurs regards furent attirés par une femme d’une grande tristesse assise sur un banc. Là où ils avaient cru qu’elle n’avait que des demi-ailes, ils eurent la surprise de les voir se déployer. Elles étaient juste en devenir ! La petite fille à ses côtés, qui semblait triste et malade reprenait des forces. Les enfants comprirent que c’était l’Ange immense, qui, en la soutenant de ses ailes, semblait lui redonner de la vie, de l’énergie. Ils voyaient comme une lumière qui l’enveloppait. Alors ils comprirent : l’ange la soutenait avec tout son amour en entourant cette jeune femme et apparemment elle le percevait et l’acceptait. Au bout d’un temps, la petit fille triste devint joyeuse et fusionna d’un coup avec son corps d’adulte. Ses ailes se déployèrent un peu plus et des larmes d’apaisement ruisselaient sur son visage souriant. On aurait même dit que son visage était plus juvénile, avec des yeux  pétillants de gaieté enfantine. Elle se leva et reprit sa route d’un pas léger, dotée d’ailes plus grandes.

« Nous ne faisons jamais rien à votre place, car les décisions vous appartiennent.

Mais en aimant les parties de vous qui n’ont pas été vues, entendues, qui ont manqué, qui se sont senties impuissantes, vous vous insufflez de  l’énergie-amour. Petit à petit, cela vous donnera la force de vous apaiser et de guérir… et de profiter de votre présent »

Les deux enfants étaient ébahis par ce qu’ils venaient de voir, cela les rendait joyeux !

« Vous avez posé la question, comment vous pouvez faire pour aider ? Aimer, ce n’est pas tout accepter. C’est soutenir de ses ailes d’ange là où l’autre n’a pas été soutenu… Vous aussi, vous avez des ailes et vous pouvez donner cet appui dont ton oncle a besoin. Il n’est pas nécessaire de croire en elles pour qu’elles existent. Il vous suffit de les imaginer.»

Sitôt la phrase prononcée, la gentille d’âme disparut. Ils ne perdirent pas un instant et coururent au domicile de l’oncle de la petite fille. Elle avait un double des clés car elle venait régulièrement dormir chez lui après l’école. Je vous l’ai déjà dit : elle l’adorait !

Comme ils ne trouvèrent aucun adulte pour leur barrer le chemin, ils le cherchèrent jusqu’à le trouver endormi sur son canapé. Il avait l’air bien fatigué et son visage était soucieux dans son sommeil !

Alors, ils se positionnèrent chacun d’un côté et imaginèrent des ailes dans leurs dos.

Ils ne pouvaient les voir mais qu’importe ! Leur imagination enfantine  leur permit de les ouvrir et de les déployer pour donner tout l’amour qu’ils pouvaient offrir. Leurs cœurs étaient purs et les doutes n’existaient pas. Ils aimèrent aussi fort qu’ils le purent l’enfant en colère qu’avait été l’oncle de la petite fille. Ils eurent la surprise de sentir quelque chose grandir qui se déroulait comme un parchemin jusqu’à atteindre le plafond. Ils les dirigèrent pour qu’elles entourent l’homme assoupi. On eut dit qu’il reposait sur un coussin moelleux et chaleureux à tel point qu’un énorme soupir s’échappa de sa bouche. Ils surent alors que tout irait bien.

L’histoire ne raconte pas la suite. Peut-être parce que la suite appartient à chacun, en fonction de sa foi en la vie, en sa vie…

En ce qui me concerne, j’ai soutenu l’enfant que j’ai été et, je l’avoue, en me sentant un peu ridicule au début… jusqu’à ce que je sente des larmes couler et mon cœur s’apaiser.

Ma plus grande surprise a été de sentir mes ailes se déployer… Allez-vous laisser votre âme d’enfant vous guider ?

Texte Patricia VERNERET

                                               Formatrice par le chant et Coach

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